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Les rois du Yukon

 Les rois du Yukon

Trois mille kilomètres en canoë à travers l'Alaska

Adam Weymouth

Albin Michel, 2020

Traduit par Bruno Boudard

 

Une équipée de plusieurs mois à descendre le Yukon en canoë, voyage qui n'est pas de tout repos, mais moins éreintant et dangereux que celui des saumons royaux, nés  à la source du fleuve, descendus jusqu'à la mer de Béring, puis, une fois adultes, y revenant, pour frayer ... et mourir. A la force des nageoires ils remontent les 3000 kilomètres, et le dénivelé!, n'échappant pas toujours aux pêcheurs et ... aux ours!

Au fil du voyage, Adam Weymouth ('journaliste, spécialiste des questions environnementales et écologiques') décrit élégamment et avec précision le paysage, mais rencontre toutes sortes de personnes, des 'premières nations' ou pas, et un ours (mais ça s'est bien passé, chacun a continué sa route). Oui, là, l'homme n'est pas au sommet de la chaîne alimentaire...

Détails du voyage lui-même, des rencontres et des résultats de recherches sont mêlés, rendant la lecture fort agréable et vivante. L'humour n'est pas absent.

"D'après le recensement de 2010, seules 39% des personnes vivant en Alaska y sont nées. Que le phénomène soit le fruit d'un engouement réel pour la région ou la manifestation géographique d’une sorte de syndrome de Stockholm, ce chiffre signifie que la majorité des habitants ont émigré en Alaska et qu'ils y sont restés. Il n'y a guère d'ambivalence à ce sujet chez celles et ceux que je rencontre - des températures de moins quarante ne laissent aucune place à l'ambivalence. Les gens viennent ici dans le cadre d'une affectation militaire, ou appâtés par les richesses supposées du pays. Les gens viennent ici pour s'enfuir le plus loin possible de leur famille tout en continuant à habiter en Amérique. Et certains viennent ici pour assouvir leur fantasme de la frontière sauvage, de ce lieu où l'homme peut vivre à l'écart du système."

Des mots évocateurs : Klondike, par exemple, et Jack London...

La forêt boréale, en danger elle aussi

"A présent, les arbres refluent à tout allure vers le nord, au rythme de cent mètres par an. En 2008, un feu de forêt s'est déclenché au nord du cercle arctique, alors qu'aucun terme n'existe dans le dialecte local pour désigner semblable phénomène. Les forêts boréales se sont réchauffées deux fois plus vite que la moyenne mondiale (...) et les zones climatiques remontent vers le nord dix fois plus vite que ne le peut la forêt."

Adam Weymouth rencontre aussi des Autochtones de divers âges, qui ont vu au fil du temps le nombre de saumons diminuer. Les camps de pêche et le séchage font partie de leurs traditions et façons de vivre depuis des siècles. "Ils s'interdisent le gaspillage, considéré comme immoral. Ce n'est pas une question de rareté de la ressource, mais de respect." "Chaque tribu de la région Pacifique a ses rites sur la manière dont doit être consommé le premier royal de la saison." j'ai aussi pensé au livre "Payer la terre" de Joe Sacco, quand on reparle des pensionnats destinés aux enfants.

 Un livre enthousiasmant, donc, qui aborde intelligemment divers problèmes. Une mine parfaitement digeste!

"Il existe une possibilité de sauver le saumon. Après une absence de deux cents ans, il nage de nouveau à Sheffield, en Angleterre, depuis que les rivières ont été nettoyées. Il est réapparu à Portland, dans l''Oregon, comme à Paris, en France. Ils ne sont pas nombreux, mais c'est un début. Et le futur des royaux du Yukon ne paraît pas bouché lui non plus, si l'on parvient à réconcilier les intérêts divergents. Réconcilier pêche commerciale et pêche de subsistance, population de l'estuaire et population de la source, pêcheurs qui voient leur droit à la nourriture, à la richesse et à la culture remonter le fleuve sous leur nez et pêcheurs qui professent une approche de préservation, voire une interdiction totale et définitive. Ainsi que je l'ai découvert, la vie d'un fleuve et d'un cours d'eau est incroyablement complexe."

Avis : Dominique, avec plein de photos comme d'habitude!

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